Tout bien considéré celà doit faire
à peu près une année que Serendip a quitté son amarrage de port
Leucate, pour entreprendre un tour de l'Atlantique de plus de 6000
Miles Nautiques. Une année riche en événements, en déceptions
mais aussi en joies, en rencontres en expériences qui l'ont rendue à
la fois émouvante et inoubliable.
Je n'ai jamais été bon en
« nostalgie » et probablement que j'oublierai un tas de
choses en racontant cette année tellement particulière. On voulait
que Serendip se consacre à la « découverte de l'inattendu »,
le moins qu'on puisse dire c'est qu'à ce point de vue le contrat fut
largement rempli.
Nous voilà donc quittant de bon matin
notre appontement de Leucate, et nous fûmes surpris et ravis de voir
que nos amis du ponton s'étaient levés d'aussi bonne heure pour
nous souhaiter « bon vents » . « Nous »
c'étaient Lydia, Danielle, Ninon et moi.
A aucun moment je n'avait conscience de
tout ce qui allait se passer, à ce moment là j' étais plutôt
préoccupé de savoir si « j'avais tout prévu » dans ce
chantier qui m'a pris plus d'une année. ... on arrive très bien
ainsi à refouler ses angoisses sous des problèmes techniques. Et
puis .... qui peut prétendre tout prévoir ? C'est peut-être
cette « arrogance » face au destin qui me permit d'avoir
confiance en moi. Gibraltar était loin encore et les îles Canaries
plus basses encore sous l'horizon.
Les gens
Ce voyage fut fait de séparation et de
rencontres. De séparation douloureuse car à aucun moment de notre
périple méditerranéen, ni moi ni Lydia ne pensions qu'une entente,
une complicité, une tendresse, un amour de près de 12 ans puisse
s'arrêter aussi abruptement.
Mais aussi de rencontres qui me
permirent de mieux connaître et apprécier Danielle et Ninon, puis
Anthony, le jeune kiné qui fut notre équipier pour Gibraltar
Canaries. De Clarisse et Pauline mes vaillantes équipières de la
Transat, qui, malgré leur faible expérience se sont montrées tout
à fait à la hauteur. Et puis ces gens « de passage »,
bateaux-stoppeurs des Canaries, parmi lesquels Plume et Alise, les
deux musicienne qui sans le savoir, m'ont encouragé à continuer.
« On trébuche, puis on se relève et on repart »
(même si on s'est un peu ouvert les genoux). Enfin le Capitaine
Corvette Paul, qui pour fêter son anniversaire accepta de reconduire
Serendip vers les eaux Méditerranéennes.
Islands and Atlantic Odyssey
Et puis il y eu tous mes copains des
Rallyes : Islands Odyssey puis Atlantic Odyssey II . Oh je sais,
certains seront étonnés de voir qu'une traversée, qui serait une
quète de liberté, de marginalité, d'individualisme, se fasse « en
groupe », comme un voyage organisé. En réalité, ils se
trompe sur deux points :
Une transat n'est pas
nécessairement un acte solitaire, mais plutôt (à mes yeux du
moins) une expérience humaine entre les divers équipiers qui
« partagent le même bateau ». Plutôt qu'une
introspection, il s'agit là d'un unique vécu de relations
interpersonnelles.
Les rallyse de Cornell Sailing
Events tiennentt très peu du « voyage organisé », Les
organisateurs arrivent, avec beaucoup de savoir faire, à la fois à
laisser toute liberté aux participants et à la fois à organiser
des activités d'un grand intérêt : Conférences
préparatoires à une traversé. Inspection et conseils en matière
de sécurité, mais aussi soirées animées ou sociales que ce soit
dans les Yacht Clubs, les petits restos ou apéritifs informels
entre participants. L'accueil lors du lunch qui suivit notre arrivé
à la Martinique, me mis les larmes aux yeux, tant l'émotion était
fortes et tant je savait mes amis de odyssée étaient sincères
dans leur joie de nous retrouver.
Car dès les premiers jours, tant les
participants que les organisateurs nous furent devenus familiers.
J'ai gardé de ces deux rallye de véritables amitiés et de vraies
complicités. Il y avait dans le groupe une série de gens tout à
fait intéressant tant du point de vue humain que du point de vue de
ce qui les avait amené à tenter l'aventure ... peu d'entre eux
fuyaient quelques choses. Tous en fait , cherchaient à passer « à
une vitesse de vie supérieure », rien que cela suffirait à
les rendre intéressants.
Je voudrait faire ici une mention toute
particulière aux organisateurs de Cornell Sailing Events :
Pascal et Pascale, qui, avec tact et discrétion m'ont soutenu à
leur insu, dans ces moments difficiles que fut ma séparation d'avec
Lydia. Et puis Jimmy Cornell, inénarrable navigateur qui est
probablement l'homme au monde le plus au courant de la croisière
océanique, encyclopédie vivante, mais plus que cela homme de
communication, sachant expliquer et transmettre ses conceptions du
voyage à la voile. Je tenterai de n'oublier aucune de ses remarques
et recommandations, mais pour en choisir une, je me remémorerai sa
réaction, lorsque nous sommes venu le voir, inquiet de ce que le
départ de Gran Canaria, devait se faire un samedi où un fort coup
de vent était prévu. Devrions-nous prendre le départ ? Sa
réponse fut d'anthologie : « je me demande quels genre de
gens vous êtes de vous soucier le mercredi du temps qu'il fera
samedi ... on verra. » Au moment où il prononça ses
paroles, je fus surpris. A présent, ayant ajouté quelques miles
d'Océan à mon sillage, je commence à les comprendre. Merci Jimmy
pour cette belle leçon d'humilité et de positivité... tout n'est
pas contrôlable ... et c'est heureux ainsi !
Les découvertes.
Tout comme les individus, les paysages
nous ont soit déçus, soit enthousiasmés et certains même allant
d'une déception première à un grand enthousiasme par la suite...
il ne faut pas toujours se fier aux apparences premières.
Les Canaries
Arrivé à Lanzarote le paysage fait de
cendres me fit penser au pays noir et aux terrils de Charleroi.
« Affronter la mer pour trouver çà !» fut ma première
réaction. Pourtant petit à petit je découvris que « çà »
présentait des trésors cachés, une architecture inattendue, de
l’authenticité et des habitants qui ont su mêler à la dureté de
leurs conditions, une douceur de vivre inégalée. Cette douceur de
vivre je l'ai moins ressentie à las Palmas de Gran Canaria, mais
peut-être était ce parce que le port lui-même était moins
accueillant. Ténériffe fut aussi pour moi une révélation, c'est
un lieu où je me verrai bien vivre : douceur du climat, modéré
toute l'année. Activités culturelles. Belles plages, Dimensions de
l'île intéressante. Mais d'autres endroits furent aussi étonnants :
La Palma avec ses maisons datant de Christophe Colomb. La Gomera,
avec ses vallées à pic et son langage sifflé unique au monde (ou
presque) . Les Canaries m'ont séduites au point que je ne puis
m'empècher de vouloir y retourner avec mon bateau.
Ce fut aussi l'escale de mon départ
pour l'Atlantic Odyssey II, j'ai pu y trouver fruits légumes et tout
l'approvisionnement ainsi que la technique nécessaire à ce que
Serendip puisse être prêt pour le grand saut. A ce propos, avec le
recul, on en a même peut-être trop
fait ; mais en fait-on jamais trop ? A l'arrivée il nous
restait, des vivres, de l'eau et du diesel n'est-ce as ainsi que ce
doit être.
Culinairement,
les Canaries ne manquent pas non plus d'intérêt. Nous y avons
découvert, les papas arrugatas, pomme de terres cuites à l'eau de
mer, le Gofio farine de blé grillée et tant d'autres choses dont
nous avons retenu le goût plutôt que les noms. Et puis les fruits :
ananas, bananes, mangues délicieuses.
Assurément les
Canaries tinrent leurs promesses.
La Martinique
Je n'oserais pas
en dire autant de la Martinique, sorte de petite France sous les
tropiques mais ayant des manquements graves. Difficultés de
déplacement en transports publics (pas d'autobus, par exemple)
orienté tourisme de groupe avec très peu de possibilités
organisées pour le touriste individuel. Ni le climat, ni la
nonchalance m'ont permis de me « réconcilier » avec ce
pays où pas grand chose ne fonctionne comme il devrait.
Grenadines
Finalement c'est au cours de notre
petite croisière vers les grenadines que j'ai pu apprécier les
Caraibes à leur juste valeur et la douceur de St Vincent avec son
mouillage de Marigot Bay ou encore Union et Bequia. Autant de
destinations tout à fait charmante. On se rappelera des langoustes
grillées dégustées sur la plage dans les Tobago Cays, de la
musique des steel bands à Deux Pitons, tant de choses qui font le
dépaysement et le charme des Antilles. C'était la deuxième fois
que je visitais les Grenadines et j'y retournerai encore avec
plaisir..
Voila dans une coquille de noix les
choses que j'ai voulu mettre en avant sur cette année écoulée...
elle demande à « encore » et je fais tout pour celà.
Reste à trouver mes nouveaux compagnons de route... ce qui prendra
un peu de temps.